Deve­nir — Michelle Obama

Il y a quelques années j’ai ache­té le livre “Deve­nir” de Michelle Oba­ma, un peu hon­teu­se­ment je l’avoue, car je l’imaginais com­mer­cial voire mièvre, à la gloire des Oba­ma, écrit par un ou plu­sieurs ‘prête-plumes’, pour­tant je l’ai ache­té quand même, avec de la curio­si­té fina­le­ment… Je n’ai pas regret­té et aujourd’hui je me sou­viens ! 

Peu importe fina­le­ment si ce n’est pas Michelle qui a été au bout du cla­vier tout du long, le conte­nu de ce livre est très inté­res­sant, savant équi­libre entre vie per­son­nelle, fami­liale et his­toire des Etats-Unis, la petite et la grande his­toire. 

On retrouve dans ce livre la des­crip­tion de ces dif­fé­rences frap­pantes entre quar­tiers blanc et noir à Chi­ca­go et des évo­lu­tions tel­le­ment pal­pables des années 70 vers une plus grande sépa­ra­tion de classe, vers plus d’injustice aus­si. Et on constate ce que cela implique comme efforts, per­son­nels, col­lec­tifs et fami­liaux pour trom­per tous les pro­nos­tics, inté­grer une grande uni­ver­si­té et ‘faire son droit à Prin­ce­ton’, comme l’a fait Michelle. 

Au lycée (…) cer­tains de mes cama­rades avaient tou­jours une lon­gueur d’avance sur moi (…) mais j’essayais de ne pas me décou­ra­ger pour si peu. Si je tra­vaillais quelques heures de plus, je par­ve­nais le plus sou­vent à com­bler l’écart.” C’est aus­si un livre qui parle de per­sé­vé­rance et de réus­site. Cela rejoint l’une de mes croyances per­son­nelles qui est de s’accrocher tou­jours, même dans l’adversité, à faire de son mieux. 

C’est un écrit qui per­met de croire en soi, et de voir que c’est impor­tant de le faire en s’appuyant sur ceux qui nous aiment et nous sou­tiennent, quels qu’ils soient. Elle nous dit : “Tous ont eu à affron­ter le scep­ti­cisme d’autrui. Cer­tains conti­nuent à bra­ver des foules hur­lantes de détrac­teurs et de défai­tistes prêtes à cla­mer “je te l’avais bien dit” au moindre faux pas, à la moindre erreur. Le vacarme ne cesse pas, mais, par­mi les gens que j’ai connus, ceux qui ont le mieux réus­si sont ceux qui ont appris à vivre avec cette incré­du­li­té, à s’appuyer sur ceux qui leur font confiance et à pour­suivre les objec­tifs qu’ils se sont fixés imper­tur­ba­ble­ment.”. 

Elle parle de soli­da­ri­té fami­liale, ami­cale : “J’avais pu entrer en rela­tion avec un groupe de femmes actives et for­mer un petit cercle (…) nous fai­sions du baby-sit­ting les unes pour les autres, orga­ni­sions des sor­ties com­munes (…) Toutes ces femmes étaient ins­truites, ambi­tieuses, dévouées à leurs enfants, et, pour la plu­part, se posaient autant de ques­tions que moi sur la manière d’arriver à conci­lier leurs mul­tiples obli­ga­tions. », et c’est aus­si sa mère Marian qui vient à 4h du matin gar­der ses petites-filles pour que Michelle puisse faire son sport avant de com­men­cer sa jour­née, pen­dant que Barack est en cam­pagne.  

Elle parle aus­si de de lui, pudi­que­ment, mais avec une admi­ra­tion légi­time et calme, comme lorsqu’elle évoque son dis­cours de 2004 :  “Il sur­gis­sait du néant avec un nom bizarre et une his­toire étrange, espé­rant tou­cher une corde sen­sible chez les élec­teurs démo­crates (…) il a par­lé pen­dant 17 minutes ce soir-là, expli­quant qui il était, d’où il venait (…) il s’est pré­sen­té non pas comme un out­si­der, mais plu­tôt comme l’incarnation au sens propre de l’histoire amé­ri­caine. Il a appe­lé au triomphe de l’espoir sur le cynisme. Il a par­lé avec espoir, il a pro­je­té de l’espoir.”  

Rien de scan­da­leux ou de crous­tillant sur lui, donc : accros aux tabloïds, pas­sez votre che­min ! On lira plu­tôt que “S’il y a une chose que je sais à pro­pos de mon mari, c’est qu’il ne faut pas lui faire miroi­ter une pos­si­bi­li­té, une occa­sion d’élargir sa sphère d’influence et ima­gi­ner qu’il recu­le­ra. Il ne recule pas. Jamais. » et c’est bien aus­si ce qu’on attend d’un homme d’état.  

Et pen­dant toutes ces années d’expansion poli­tique de son mari, elle reste entière et elle assure “en réa­li­té je n’avais envie de renon­cer à rien”, même si on ne peut que consta­ter aus­si par la des­crip­tion qu’elle fait des années pas­sées à la mai­son blanche, que cette aven­ture poli­tique n’allait pas sans contraintes …  

J’imagine aisé­ment aus­si que voir son amou­reux, père de ses filles, à la tête d’un grand pays comme les Etats-Unis, pro­non­cer dans son dis­cours d’investiture la phrase sui­vante : “Nous sommes réunis en ce jour parce que nous avons choi­si de faire triom­pher l’espoir sur la peur, et l’unité d’intention sur le conflit et la dis­corde”, doit être vrai­ment un grand moment, qu’on appré­cie ou pas son action poli­tique n’y change rien, selon moi. 

Ce qui m’a éga­le­ment impres­sion­née est que son humi­li­té puisse son­ner si juste, alors qu’elle ren­contre tant de per­sonnes excep­tion­nelles, comme après sa visite en Afrique du Sud et sa ren­contre avec Nel­son Man­de­la : “La vie m’apprenait que le chan­ge­ment et le pro­grès adve­naient len­te­ment. Pas en deux ans, pas en quatre ans, ni même en une vie. Nous plan­tions les graines du chan­ge­ment et nous n’en ver­rions peut-être jamais les fruits. Il fal­lait être patients.” 

Enfin, dans les der­nières pages, je m’aperçois qu’elle a publié ce livre à mon âge actuel et je vou­drais pou­voir être tous les jours sûre que comme Michelle Oba­ma : “à 54 ans, je suis tou­jours en deve­nir, et j’espère l’être indé­fi­ni­ment”. 

Donc, je vous pro­pose de ne pas bou­der votre plai­sir en vous plon­geant dans ce pavé, aujourd’hui acces­sible en livre de poche. En tous cas, je n’ai pas bou­dé le mien et j’ai eu bien du plai­sir à voir retra­cée la réus­site de cette famille, et que Michelle en soit fière, en toute sim­pli­ci­té.